Résumé
Ainsi Le Katanga a été inventé par un mercenaire…
Ainsi commence cette somptueuse trilogie de Nury et Vallée.
1960, le Congo devient indépendant, le Katanga déclare sécession, œuvre en sous main de la société d’exploitation de diamants, la UMHK.
Donc c’est la guerre civile, période idéale pour des aventuriers de tous bords, des mercenaires anciens d’Indochine, de l’Algérie, voire de la SS, attirés par l’appât du gain, des diamants faciles, mais pas que. C’est aussi l’occasion pour eux tous de continuer à affirmer leur conception de la suprématie blanche, battue en brèche depuis la seconde guerre mondiale et les défaites de la décolonisation. Pas de politicien ici pour les arrêter dans leurs violences auprès de la population locale, qu’ils continuent allègrement de traiter en sous-couche de l’humanité. Mais les responsables politiques locaux sont pires encore, assoiffés de pouvoir et d’argent, pressés de prendre la place de l’ancien maître blanc, et sans aucune compassion pour leurs compatriotes.
Et on se laisse prendre, entraîner, plonger dans les profondeurs moites d’une quête aux diamants. On tremble pour le pauvre Charlie, on frissonne pour la belle Alicia, on trouve un sympathique air de Lino Ventura au mercenaire Félix Cantor, on espère que le gros SS Gunther crèvera dans les pires douleurs, on s’inquiète presque pour la pourriture d’Orsini, conseiller spécial de l’Elysée…
Ca flingue à tout va, mais c’est très humain. Nury parsème son récit d’anecdotes qui nous font aimer ses personnages, losers en puissance près des politiciens véreux. Ses mots sont cisaillés, précis, son scénario d’une justesse rare qui se maintient au plus haut niveau sur les 3 albums. Si vous n’êtes pas convaincus à ce stade, ouvrez le tome 1, planche 34 et lisez la prière de Cantor :
“Seigneur, je ne vous demande ni le bonheur, ni la fortune, ni même la santé.
Tout ça on vous le demande tellement… que vous ne devez plus en avoir.
Donnez-moi plutôt ce qu’il vous reste.
Donnez-moi ce que les autres vous refusent.
Je veux l’insécurité et l’inquiétude.
Je veux la bagarre et la tourmente.”
Vallée au dessin est éblouissant. J’ai lu et relu les 3 tomes, je n’ai pas vu une faute. Les cases sont léchées, fouillées, détaillées. Le trait est puissant. On a l’odeur du sang dans les combats, celle de la peur dans les yeux des colons, celle du vice dans les politiciens locaux, celle de la sueur chez tous, tout le temps. Mon conseil est de privilégier, si vous le pouvez, l’édition noir et blanc., la force du dessin y ressort bien plus. Pour comparer, la même planche du T1 ci-après, dans les deux versions.
Pourquoi vous aimerez
Parce que vous avez adoré “Il était une fois en France”. Vous avez ri sur “Comment faire fortune en Juin 40”.
Parce que vous aimez les dessins réalistes et les histoires sans temps mort. Parce que la série se termine en seulement 3 tomes et ne vous laissera 
pas le temps de la poser.
Parce que vous aimez les scénarios ficelés aux petits oignons, les gueules à la Ventura, les films comme “100 000 dollars au soleil” ou “Taxi pour Tobrouk”.
Parce que c’est ce qui se fait vraiment de mieux dans le BD franco-belge actuellement.
Pourquoi vous n’aimeriez pas
Parce que la BD c’est du petit mickey, donc des gags en une page. Parce que vous ne supportez pas la violence, parce que vous voulez de l’eau de rose.
Parce que vous voulez des héros gentils (bon, là faut se rabattre sur Blake et Mortimer d’urgence).
Quand c’est-y que je lis cette jolie BD ?
Par tous temps. C’est un chef d’œuvre qui vous fera oublier la météo. Même si par 35° à l’ombre, vous rajouterez au réalisme…
C’est dans le Top… du mois / de l’année
Mois de sortie : Tome 3 Janvier 2019.
TOP Mensuel : Top1 = OUI.